Analyse d'un texte de Nietzsche

sur la conscience

 La conscience n’est qu’un réseau de communications entre les hommes ; c’est en cette seule qualité qu’elle a été forcée de se développer : l’homme qui vivait solitaire, en bête de proie, aurait pu s'en passer. Si nos actions, pensées, sentiments et mouvements parviennent — du moins en partie — à la surface de notre conscience, c’est le résultat d’une terrible nécessité qui a longtemps dominé l’homme, le plus menacé des animaux : il avait besoin de secours et de protection, il avait besoin de son semblable, il était obligé de savoir dire ce besoin, de savoir se rendre intelligible ; et pour tout cela, en premier lieu, il fallait qu’il eût une "conscience", qu’il "sût" lui-même ce qui lui manquait, qu’il "sût" ce qu’il sentait, qu’il "sût" ce qu’il pensait. Car comme toute créature vivante, l’homme pense constamment, mais il l’ignore. La pensée qui devient consciente ne représente que la partie la plus infime, disons la plus superficielle, la plus mauvaise, de tout ce qu’il pense : car il n’y a que cette pensée qui s’exprime en paroles, c’est-à-dire en signes d’échanges, ce qui révèle l’origine même de la conscience.
NIETZSCHE, Gai Savoir § 354

 

 

D’où vient la conscience réflexive de l’homme : est-elle donnée, en étant constitutive à part entière de l’humanité, ou bien est-elle le produit d’une nécessité, requise par la survie de l’homme ?
C’est à cette question, relative à l’origine de la conscience, que Nietzsche tente de répondre lorsqu’il rédige le paragraphe 354 de son célèbre ouvrage, le «Gai Savoir » en 1882. Nietzsche s’essaie à répondre à cette question complexe en invoquant la nécessité de survivre à laquelle l’homme fut confronté à l’aube des temps. Il expliquera que cette nécessité de survivre de l’homme, animal privé d’instinct, passe par une nécessaire prise de conscience de ses besoins, elle-même liée à la nécessité du besoin d’exprimer ses manques à ses semblables.
Nous soumettrons le texte de Nietzsche à une étude globale, suivie d’une étude linéaire qui nous aidera, non seulement à dégager l’intérêt philosophique du texte, mais également à montrer ses limites philosophiques quant à l’origine de la conscience réflexive de l’homme.


 

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