Série L (littéraire)
-
"Peut-on prouver une hypothèse scientifique ?"
- "L'homme est-il
condamné à se faire des illusions sur lui-même ?"
- Expliquer un extrait du "Gai
savoir" de Nietzsche
« Nous
disons bonnes les vertus d’un homme, non pas à cause des
résultats qu’elles peuvent avoir pour lui, mais à cause
des résultats qu’elles peuvent avoir pour nous et pour la
société : dans l’éloge de la vertu on n’a jamais
été bien « désintéressé
», on n’a jamais été bien « altruiste »
! On aurait remarqué, sans cela, que les vertus (comme
l’application, l’obéissance, la chasteté, la
piété, la justice) sont généralement
nuisibles à celui qui les possède, parce que ce sont des
instincts qui règnent en lui trop violemment, trop avidement, et
ne veulent à aucun prix se laisser contrebalancer
raisonnablement par les autres. Quand on possède une vertu, une
vraie vertu, une vertu complète (non une petite tendance
à l’avoir), on est victime de cette vertu ! Et c’est
précisément pourquoi le voisin en fait la louange ! On
loue l’homme zélé bien que son zèle gâte sa
vue, qu’il use la spontanéité et la fraîcheur de
son esprit : on vante, on plaint le jeune homme qui s’est «
tué à la tâche » parce qu’on pense : «
Pour l’ensemble social, perdre la meilleure unité n’est encore
qu’un petit sacrifice ! Il est fâcheux que ce sacrifice soit
nécessaire ! Mais il serait bien plus fâcheux que
l’individu pensât différemment, qu’il attachât plus
d’importance à se conserver et à se développer
qu’à travailler au service de tous ! » On ne plaint donc
pas ce jeune homme à cause de lui-même, mais parce que sa
mort a fait perdre à la société un instrument
soumis, sans égards pour lui-même, bref un « brave
homme », comme on dit. »
Série S (scientifique)
-
"La culture dénature-t-elle l'homme ?"
- "Peut-on avoir raison contre
les faits ?"
- Expliquer un extrait des
"Pensées" de Pascal
« Chaque degré de
bonne fortune qui nous élève dans le monde nous
éloigne davantage de la vérité, parce qu’on
appréhende plus de blesser ceux dont l’affection est plus utile
et l’aversion plus dangereuse. Un prince sera la fable de toute
l’Europe, et lui seul n’en saura rien. Je ne m’en étonne pas :
dire la vérité est utile à celui à qui on
la dit, mais désavantageux à ceux qui la disent, parce
qu’ils se font haïr. Or, ceux qui vivent avec les princes aiment
mieux leurs intérêts que celui du prince qu’ils servent ;
et ainsi, ils n’ont garde de lui procurer un avantage en se nuisant
à eux-mêmes.
Ce malheur est sans doute plus
grand et plus ordinaire dans les plus grandes fortunes ; mais les
moindres n’en sont pas exemptes, parce qu’il y a toujours quelque
intérêt à se faire aimer des hommes. Ainsi la vie
humaine n’est qu’une illusion perpétuelle ; on ne fait que
s’entre-tromper et s’entre-flatter. Personne ne parle de nous en notre
présence comme il en parle en notre absence. L’union qui est
entre les hommes n’est fondée que sur cette mutuelle tromperie ;
et peu d’amitiés subsisteraient, si chacun savait ce que son ami
dit de lui lorsqu’il n’y est pas, quoiqu’il en parle alors
sincèrement et sans passion.
L’homme n’est donc que
déguisement, que mensonge et hypocrisie, et en soi-même et
à l’égard des autres. Il ne veut donc pas qu’on lui dise
la vérité. Il évite de la dire aux autres ; et
toutes ces dispositions, si éloignées de la justice et de
la raison, ont une racine naturelle dans son coeur. »
Série ES (économique et social)
-
"La liberté est-elle menacée par l'égalité
?"
- "L'art est-il moins
nécessaire que la science ?"
- Expliquer un extrait de "Les
bienfaits" de Sénèque
« Si c’est
l’intérêt et un vil calcul qui me rendent
généreux, si je ne suis jamais serviable que pour obtenir
en échange un service, je ne ferai pas de bien à celui
qui part pour des pays situés sous d’autres cieux,
éloignés du mien, qui s’absente pour toujours ; je ne
donnerai pas à celui dont la santé est compromise au
point qu’il ne lui reste aucun espoir de guérison ; je ne
donnerai pas, si moi-même je sens décliner mes forces, car
je n’ai plus le temps de rentrer dans mes avances. Et pourtant (ceci
pour te prouver que la bienfaisance est une pratique désirable
en soi) l’étranger qui tout à l’heure s’en est venu
atterrir dans notre port et qui doit tout de suite repartir
reçoit notre assistance ; à l’inconnu qui a fait naufrage
nous donnons, pour qu’il soit rapatrié, un navire tout
équipé. Il part, connaissant à peine l’auteur de
son salut ; comme il ne doit jamais plus revenir à portée
de nos regards il transfère sa dette aux dieux mêmes et il
leur demande dans sa prière de reconnaître à sa
place notre bienfait ; en attendant nous trouvons du charme au
sentiment d’avoir fait un peu de bien dont nous ne recueillerons pas le
fruit. Et lorsque nous sommes arrivés au terme de la vie, que
nous réglons nos dispositions testamentaires, n’est-il pas vrai
que nous répartissons des bienfaits dont il ne nous reviendra
aucun profit ? Combien d’heures l’on y passe ! Que de temps on discute,
seul avec soi-même, pour savoir combien donner et à qui !
Qu’importe, en vérité, de savoir à qui l’on veut
donner puisqu’il ne nous en reviendra rien en aucun cas ? Pourtant,
jamais nous ne donnons plus méticuleusement ; jamais nos choix
ne sont soumis à un contrôle plus rigoureux qu’à
l’heure où, l’intérêt n’existant plus, seule
l’idée du bien se dresse devant notre regard. »
BACCALAUREAT TECHNO
- "L'art est-il un moyen
d'accéder à la vérité ?"
- "Est-ce la loi qui
définit ce qui est juste ?"
- Expliquer un texte de Bergson
« Notre
conscience nous avertit […] que nous sommes des êtres libres.
Avant d’accomplir une action, quelle qu’elle soit, nous nous disons que
nous pourrions nous en abstenir. Nous concevons […] divers motifs et
par conséquent diverses actions possibles, et après avoir
agi, nous nous disons encore que, si nous avions voulu, nous aurions pu
autrement faire. – Sinon, comment s’expliquerait le regret d’une action
accomplie ? Regrette-t-on ce qui ne pouvait pas être autrement
qu’il n’a été ? Ne nous disons-nous pas quelquefois :
« Si j’avais su, j’aurais autrement agi ; j’ai eu tort. »
On ne s’attaque ainsi rétrospectivement qu’à des actes
contingents ou qui paraissent l’être. Le remords ne
s’expliquerait pas plus que le regret si nous n’étions pas
libres ; car comment éprouver de la douleur pour une action
accomplie et qui ne pouvait pas ne pas s’accomplir ? – Donc, un fait
est indiscutable, c’est que notre conscience témoigne de notre
liberté. »