Nous admettons que la vie psychique est la fonction d'un appareil auquel nous attribuons une étendue spatiale et que nous supposons formé de plusieurs parties...

C'est l'étude de l'évolution des individus qui nous a permis de connaître cet appareil psychique. Nous donnons à la plus ancienne de ces provinces ou instances psychiques le nom de CA; son contenu comprend tout ce que l'être apporte en naissant, tout ce qui a été constitutionnellement déterminé, donc avant tout les pulsions émanées de l'organisation somatique et qui trouvent dans le ça, sous des formes qui nous restent inconnues, un premier mode d'expression psychique.

Sous l'influence du monde extérieur réel qui nous environne, une fraction du ça subit une évolution particulière. A partir de la couche corticale originelle pourvue d'organes aptes à percevoir les excitations ainsi qu'à se protéger contre elles, une organisation spéciale s'établit qui, dès lors, va servir d'intermédiaire entre le ça et l'extérieur. C'est à cette fraction du psychisme que nous donnons le nom de MOI.

Caractères principaux du moi.- Par suite de relations déjà établies entre la perception sensorielle et les actions musculaires, le moi dispose du contrôle des mouvements volontaires. Il assure l'auto-conservation et pour ce qui concerne l'extérieur, remplit sa tâche en apprenant à connaître les excitations, en accumulant (dans la mémoire) les expériences qu'elles lui fournissent, en évitant les excitations trop fortes (par la fuite), en s'accomodant des excitations modérées (par l'adaptation), enfin en arrivant à modifier, de façon appropriée et à son avantage, le monde extérieur (activité). Au-dedans, il mène une action contre le ça en acquérant la maîtrise des exigences pulsionnelles et en décidant si celles-ci peuvent être satisfaites ou s'il convient de différer cette satisfaction jusqu'au moment plus favorable ou encore s'il faut les étouffer tout à fait. Dans son activité le moi est guidé par la prise en considération des tensions provoquées par les excitations du dedans et du dehors. Un accroissement de tension provoque généralement du déplaisir, sa diminution engendre du plaisir. Toutefois le déplaisir ou le plaisir ne dépendent probablement pas du degré absolu des tensions mais plutôt du rythme des variations de ces dernières. Le moi tend vers le plaisir et cherche à éviter le déplaisir...

Durant la longue période d'enfance qu'il traverse et pendant laquelle il dépend de ses parents, l'individu en cours d'évolution voit se former, comme par une sorte de précipité, dans son moi une instance particulière par laquelle se prolonge l'influence parentale. Cette instance, c'est le SURMOI. Dans la mesure où le sur-moi se détache du moi ou s'oppose à lui, il constitue une troisième puissance dont le moi est obligé de tenir compte.

Est considéré comme correct tout comportement du moi qui satisfait à la fois les exigences du ça, du sur-moi et de la réalité, ce qui se produit quand le moi réussit à concilier ces diverses exigences... Ce n'est évidemment pas la seule personnalité des parents qui agit sur l'enfant, mais, transmise par eux, l'influence des traditions familiales, raciales et nationales ainsi que les exigences du milieu social immédiat qu'ils représentent...On voit qu'en dépit de leur différence, le ça et le sur-moi ont un point commun, tous deux, en effet, représentent le rôle du passé,

le ça, celui de l'hérédité, tandis que le moi, lui, est surtout déterminé par ce qu'il a lui-même vécu, c'est-à-dire par l'accidentel, l'actuel...

Freud, Abrégé de psychanalyse (1938)

 

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