Il faut d'abord définir le nom et le verbe, puis la négation et l'affirmation, la proposition et le discours. Les mots vocaux sont les symboles des affections ou des états de l'âme ; les mots écrits, les symboles des mots émis par la voix. Et de même que l'écriture n'est pas identique chez tous les hommes, la langue parlée n'est pas non plus la même, bien que les affections dont ces expressions sont les signes immédiats soient identiques pour tous, comme sont identiques aussi les objets dont ces états sont les images ou les copies. ( ... ) Et de même qu'il y a dans notre âme des pensées indépendantes du vrai et du faux, tandis qu'à d'autres appartient nécessairement l'un ou l'autre, ainsi en est il pour la parole, car la composition et la division sont des conditions essentielles pour pouvoir parler de vrai et de faux. Les noms et les verbes en eux-mêmes sont semblables au concept qui n'est ni composé, ni divisé : tels sont l'homme, le blanc, quand on les prononce sans la moindre addition. Sous cette forme, ils ne sont encore ni vrais, ni faux. En guise de preuve, prenons le fait suivant : bouc-cerf, bien qu'il signifie quelque chose, n'est encore ni vrai, ni faux, à moins de prédiquer qu'il est ou qu'il n'est pas, de façon absolue ou sans indication de temps, ou avec référence au temps.

 

Aristote, De l'interprétation, 1, 11 6a 1 20.

 

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