Une perfection majeure de la connaissance et même la condition essentielle et inséparable de toute sa perfection, c'est la vérité. La vérité, dit‑on, consiste dans l'accord de la connaissance avec l'objet. Selon cette simple définition de mot, ma connaissance doit donc s'accorder avec l'objet pour avoir valeur de vérité. Or le seul moyen que j'aide comparer l'objet avec ma connaissance, c'est que je le connaisse. Ainsi ma connaissance doit se confirmer elle‑même; mais c'est bien loin de suffire à la vérité. Car puisque l'objet est hors de moi et que la connaissance est en moi, tour ce que je puis apprécier c'est si ma connaissance de l'objet s'accorde avec ma connaissance de l'objet. Les anciens appelaient diallèle un tel cercle dans la définition. Et effectivement c'est cette faute que les sceptiques n'ont cessé de reprocher aux logiciens; ils remarquaient qu'il en est de cette définition de la vérité comme d'un homme qui ferait une déposition au tribunal et invoquerait comme témoin quelqu'un que personnelle connaît, mais qui voudrait étre cru en affirmant que celui qui l'invoque comme témoin est on honnête homme. Reproche absolument fondé, mais la solution du problème en question est totalement impossible pour tout le monde.

 

Emmanuel Kant, Logique , Guillermit, éd.Vrin, 1997, pp. 54‑55

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