Comprenons donc que l'âme est un corps subtil répandu dans toute l'étendue de l'agrégat, l'organisme ; qu'elle ressemble beau-coup à un souffle mêlé d'une certaine quantité de chaleur ; que, quant à ses parties, elles l'emportent de beaucoup en subtilité sur le souffle et la chaleur mêmes ; enfin que grâce à cela, elle est plus inti-mement unie à tout le reste de l'agrégat. [...] Il faut aussi se représen-ter ce qu'est l'incorporéité attribuée à l'âme, car on pourrait en venir à croire que le mot désigne quelque chose de proprement incorporel. On ne peut rien concevoir de proprement incorporel que le vide. Mais le vde ne peut ni agir ni pâtir : il ne fait que permettre aux corps de se mouvoir à travers lui. Par conséquent, ceux qui disent que l'âme est au sens propre un être incorporel prononcent des paroles vaines. Si elle était incorporelle, en effet, elle ne pourrait agir ni pâtir. Or nous voyons avec évidence que ces deux accidents sont réel-lement éprouvés par I'âme. Telles sont nos doctrines sur la nature de l'âme.

Epicure, Lettre à Hérodote